RETOUR A ALEXANDRIE - EXTRAIT D'UN PÈLERINAGE

Nous devions nous rencontrer au Hilton du Caire, deux couples, amis d'enfance, l'un de New York, l'autre de Sydney, revenant a leurs racines; La paix régnait, Anwar Sadat était au pouvoir, c'était donc le moment propice...
J'étais pleine d'appréhension, je voulais conserver mes souvenirs intacts.
Était-ce vraiment des souvenirs réels, et n'avais-je pas embelli, au cours des années ces jours magnifiques d'une jeunesse inoubliable? ou s'arrêtait la réalité et ou commençait le rêve? Il fallait que je me rende compte de visu...
Notre arrive au Caire Charles et moi s'est passe sans incident. Nous avions deux jours avant l'arrive de New York de nos amis Edgar et Suzy Magar née Harari également d'Alexandrie. Nous avons occupé ce temps a revoir les lieux connus du Caire , visiter le Musée, le Khan Khalil, traverser a pied le pont de Kasr el Nil flanque des deux lions majestueux; nous étions émus de revoir les Égyptiens, d'entendre parler l'Arabe et d'ecouter les chants a tue tête d'Abdel Wahab et d'Om Kalsoum dans les cafés
populaires C'était émouvant et magnifique, mais ce n'était pas Alexandrie...

Pour les nostalgique de l'Alexandrie d'antan, nous vous conseillons :

         http://www.egyptedantan.com/alexandrie/alexandrie.htm

 

Arrivée de nos amis deux jours plus tard; après la grande joie des retrouvailles et ne tenant plus d'impatience, nous refusons toute offre de guide ou de "coach" touristique, nous décidons de louer une voiture, d'y mettre nos bagages et de nous acheminer vers Alexandrie tout , , seuls tous les quatre...
Nous voila donc en route dans une Opel modèle ancien , très ancien même.
Il faisait très chaud, la voiture n'était pas climatisée, et c'était très long...
Mais voila que tout a coup, sur la route asphaltée jaunie par la poussière se pointe le Rest House Nous y faisons escale pour rafraîchissements mais reprenons la route aussitôt' car rien ne peut ternir notre anticipation et impatience de revoir enfin cette Alexandrie de notre jeunesse...ni la chaleur torride du dessert, la poussière, l'état vétuste et délaisse du Rest House, notre exaltation a l'idee d'une Alexandrie a moins de deux heures de route, est toujours aussi forte
Nous débouchons enfin sur la rue d'Aboukir a la hauteur de Chatby et d'un élan nous nous dirigeons directement vers la Corniche en passant par le St. Marc. En silence nous sortons de la voiture pour mieux savourer ce moment; cette Corniche dont nous avons tant rêvée a l'air tellement plus étroite que nous nous l'imaginions...
Au coin d'une rue j'aperçoit une orgue de barbarie et plus loin un petit singe danse au son du tambourin de son maître; comme c'est bon d'être de retour...
Malgré le parapet rouille, les immeubles délabrées, les nappes usées sur les tables des cafés en plein air tout le long du trottoir, pour nous c'est toujours la Corniche merveilleuse de notre adolescence... Silencieusement, comme si elle se rendait compte de ce moment solennel, une fillette nous tend des colliers de jasmins parfumes...
Et je comprend enfin que je n'ai pas besoin d'attendre plus longtemps, j'ai déjà la réponse a toutes mes incertitudes. Je sais que quelques soient les
changements apportes par le passage du temps, l'exode de milliers de personnes et les différents régimes politiques, Alexandrie restera toujours et malgré tout le berceau de notre jeunesse ...
Alors, debout face a cette Méditerranée tant aimée, un sentiment de sérénité m'envahit.. et je sais que je quitterai bientôt Alexandrie en y laissant a jamais une partie de moi-même...
Et je murmure dans la langue de mon pays d'adoption: "I have finally found my roots..."

LOLA MARS SETTON