Les Grands Magasins
du Caire…
Ou la Mémoire rattrapée par le Présent !
Pour ceux d’entre nous qui avons grandi au
Caire, nous avons tous le souvenir de Grands Magasins qui allaient par les
noms de Cicurel, Orosdi-Back (Omar Effendi), Sednaoui, Chemla et dont la
clientèle englobait toutes les couches de la population.
Grâce à Désiré Sakkal de l’Association HSJE
(Historical Society of Jews from Egypt)
qui nous l’a signalé, nous avons trouvé un article publié dans
la revue de la Chambre de Commerce Américaine en Egypte qui annonçait la
privatisation des chaînes des grands magasins en Egypte encore contrôlées
par l’Etat.
Nous avons décidé de publier des extraits en
Français de cet article, qui décrit ce que sont devenus ces noms de
magasins, ces temples du commerce qui n’avaient pas à envier
grand-chose à leurs homologues dans les grands pays européens, entre les
années 1920 et 1955, sans aucun doute.
Qui voudrait bien acheter les
chaînes de distribution Egyptiennes ?
Après bientôt quatre décennies, l'expérience de gestion par l'Etat
des chaînes de grands magasins les plus connus est en passe de prendre de
fin. Les conditions de la vente par l4Egypte de cinq des chaînes de
grands magasins - dont les plus fameuses Omar Effendi et Sednaoui - sont
en voie d'être arrêtées. Mais le Ministre des Entreprises Publiques
Atef Ebeid a dit à la mi-Mars que les employés de ces magasins se
verraient offrir des propositions de retraite anticipée en préparation
à la mise en vente ou des locations à long terme de ces magasins pour le
1er Avril.
Quoique qu'il arrive, il n'est pas envisageable que quiconque
achètera ces magasins le fera avec l'intention de les restaurer à leur
gloire passée. Les grands magasins du Caire ont pu un jour rivaliser avec
ceux de Londres, mais aujourd'hui, ils ont été largement réduits à
rien de plus que des espaces anonymes de distribution. Dans les rues
encombrées de l'Egypte et dans la nouvelles économie concurrentielle,
ceci ne mérite pas d'être négligé. En fait, cette espace pourrait
faire la différence dans la réussite future d'une société. Mais le
retour de ces chaînes de magasin vers le secteur privé risque d'être
tout sauf romantique.
" En tant qu'espace commercial, ce sont des actifs
sous-utilisés et ils possèdent un potentiel considérable " a dit
un banquier d'affaires basé au Caire à propos des chaînes Omar Effendi
et Sednaoui ". Les investisseurs seront à la recherche d'espace et
de force de distribution.
L'état est responsable de cette transformation - autant pour
l'expansion du nombre des magasins que dans l'écrasement de la
personnalités des magasins. L'état a réussi à faire croître ces
chaînes, en différenciant les personnalités. Mais l'état a également
opéré la fusion le prestige de l'élite cosmopolitaine du commerce avec
les produits de consommation courante fabriqués par les entreprises
d'état. Comme un client faisant du lèche-vitrines devant un Sednaoui au
centre du Caire " Vous savez que cela ne vaut pas la peine d'être
acheté, mais vous y jetez un coup-d'œil uniquement parce que c'est en
vitrine ".
Avant de devenir les magasins où des marchandises tout à fait
quelconques se trouvent en abondance, les grands magasins formaient le cœur
d'une quartier commercial au centre de la ville du Caire que les
urbanistes cherchent à recréer de nos jours. Sednaoui, Adès, Cicurel,
Hannaux et Omar Effendi (Orosdi Back) étaient des entreprises d'hommes
d'affaires étrangers qui résidaient en Egypte (et qui étaient tous
d'origine juive, à l'exception des frères Sednaoui, qui étaient des
Chrétiens d'origine syrienne), et qui étaient venus en Egypte de Syrie,
de Turquie et d'Europe centrale au début du 20ème siècle et avaient
crée un ensemble de grands magasins dont les plus grands rivalisaient
avec les quartiers marchands de Londres, New Yorke et Paris.
Le magasin Cicurel situé sur la rue qui a été rebaptisée la rue
du 26 Juillet proposait les vêtements, les tissus et les articles de
ménage de la meilleure qualité que pouvaient souhaiter les clients les
plus exigeants et fortunés qui le fréquentaient, tandis que le magasin
Sednaoui, de trois étages qui était tout proche, tirait parti de son
réseau d'acheteurs à travers le monde pour fournir les marchandises qui
figuraient dans ses catalogues et qui alimentaient ses ventes
innombrables. A l'époque, les vitrines attiraient les clients pour les
amener à entrer dans le magasin, et les soldes régulières de Sednaoui
mettaient les marchandises à la portée des acheteurs aux revenus
modestes pour lesquels les produits de luxe qui figuraient de manière
proéminente chez Cicurel étaient hors de leur portée.
Les années de prospérité des grands magasins du Caire ont pris
fin peu d'années après la Révolution. Après la nationalisation du
Canal de Suez et des Banques, les grands magasins ont subi le même sort
peu après. En 1961, ils ont été nationalisés dans leur totalité,
ouvrant la voie à ce que l'historien Cairote, Samir Raafat, a appelé,
" l'époque des comptoirs tristes, aux produits khaki des
coopératives ". Les grandes familles marchandes d'origine
étrangères qui n'avaient pas déjà transféré leurs biens hors du
pays, n'avaient plus aucune raison d'y demeurer, et ont quitté le pays à
leur tour.
Tristement, les noms des magasins ont été dévalués avec la
qualité de leurs marchandises. " Le nom ne signifient plus
grand-chose de nos jours " a dit Mamdouh Zahran, du groupe
d'investissement le Zahran Investment Group. " L'emplacement de ces
magasins, particulièrement les plus grands, hautement visibles dans le
centre ville au Caire, est ce qui a de la valeur, pour les investisseurs.
Ceux qui sont à des emplacements stratégiques ne peuvent être comparés
à aucun espace. ".
Les sociétés de commerce de détail arrivent à la fin de leur
période d'appartenance au secteur public, avec le même bilan que
d'autres sociétés du secteur public : leur taille. Pendant les 38
années qui se sont écoulées depuis leur nationalisation, Sednaoui et
Omar Effendi ont grandi au point de devenir des groupes mammouths. Omar
Effendi a 82 succursales réparties à travers le pays, ainsi que 15
dépôts de marchandises. Sednaoui posséde 74 magasins et 51 entrepôts.
Les estimations de l'espace total marchand disponible pour les deux
chaînes sont énormes par rapport aux surfaces disponibles sur le marché
immobilier commercial. Le magasin Sednaoui du quartier de Ataba a 8.250
mètres carrés dont 1.850 mètres carrés au rez-de-chaussée. La
succursale de la rue du 26 juillet possède 1.462 mètres carrés. Les
différentes succursales de Omar Effendi à travers le Caire comprennent
également un total important d'espace de vente, par exemple le magasin de
la rue Adly a 5 étages avec un total de 6.000 mètres carrés. Le
Ministre des Entreprises Publiques estime la totalité des actifs de Omar
Effendi à 501 millions Livres Egyptiennes en 1998, et Sednaoui à £E 223
millions.
(Article publié dans la revue de la Chambre
de Commerce Américaine d'Egype en Avril 1999 - Auteur Joseph Logan - qui
nous a été signalé par D. Sakat de la HSJE).
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