L'AUBERGE DES PYRAMIDES ©

Roland Bertin

(c) Misha

 

 

 

 

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(c) Misha

Sur le site de L'AJOE, j'ai revu avec plaisir les dessins de Misha, et particulièrement celui annonçant un gala à l'Auberge des Pyramides. Misha avait illustré énormément d'annonces de nos Galas. Que de souvenirs de cette " Auberge " dont j'ai été le directeur artistique pendant près douze ans...

Pourquoi "l'Auberge" ? probablement en raison de sa vocation première puisque, au départ Soussa, son initiateur, ne souhaitait que créer une Auberge-Restaurant sur la route des Pyramides. La suite des événements en ont fait le grand établissement où se sont produites les plus grandes vedettes mondiales de l'époque. Jugez-en

Luis Mariano, Maurice Chevalier, Edith Piaf, Roger Nicolas, Renée Lebas, Mistinguett, Georges Guétary, Georges Ulmer, Reda Caire, Dario Moreno, Gloria Lasso, Rina Ketty, Suzy Solidor, Patachou, Josephine Baker, Léo Marjane, Jacqueline François, Dany Dauberson; Catherine Sauvage, le grand chef d'orchestre José Iturbi, Rosita Serrano … Et bien d'autres encore.

- telle l'élection de Miss Egypte, le Gala des plus jolies jambes, le Gala des Amateurs, le Crochet musical et bien d'autres - ont été le point de départ de nombreuses vocations artistiques et pour ne parler que des plus célèbres, celles de Dalida et de Claude François.

Leurs premières apparitions en public ne laissaient nullement présager l'avenir que, par la suite le destin leur réservait

C'est par ses jambes, qu'elle avait très belles, que Dalida commença sa carrière artistique. Issue d'une famille italienne modeste, Yolanda aimait se retrouver dans l'ambiance cossue de l'Auberge.

Après le Gala des jolies jambes qu'elle gagna haut la main (si l'on peut dire), elle s'essaya dans la chanson au cours du Gala des amateurs. Mais dans ce domaine, autant pour elle que pour Claude François, les débuts ne furent pas convaincants.

Immanquablement, à chacune de ces manifestations, Claude François, avec une persévérance touchante, nous arrivait de Suez pour tenter sa chance, et le public de faire du "crochet". Vous connaissez le démenti de l'histoire. !

Yolanda, quant à elle, continua de temps à autre à pousser une chanson accompagnée par l'orchestre de Baby Almanza, notre chef d'orchestre, au grand dam de celui-ci. Baby Almanza m'en voulait de lui imposer cette fille qui "chantait faux". Encore un démenti de l'histoire !

Des années durant, le Comité français de l'Elégance, venait avec de nombreuses "Miss" européennes présenter pendant toute une semaine un défilé de mode, avec le concours de maisons de haute couture.

Nous faisions coïncider notre Gala annuel de l'Election de Miss Egypte avec le séjour de cette semaine de l'élégance.

C'est ainsi que Yolanda Giliotti fit partie des candidates. Mais contrairement à la légende, elle ne fut pas élue "Miss Egypte". Le jury lui préféra une Egyptienne - dont le nom m'échappe - fort jolie d'ailleurs, mais elle avait sur Yolanda, l'Italienne, l'avantage d'être égyptienne. Yolanda fut élue première dauphine.

Entre autres cadeaux attribués à Miss Egypte, il y avait un voyage en France, pour participer, avec le Comité français de l'Elégance à une tournée en France.

Les parents de Miss Egypte refusant le départ de leur fille, c'est sa Dauphine, Yolanda Giliotti qui fut choisie pour la remplacer.

Et c'est ainsi que le sort de Yolanda se décida. La suite, on la connaît par les écrits qui lui furent consacrés.
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Mais l'Auberge des Pyramides n'était pas seulement un établissement de spectacles et de loisirs. C'était aussi " le dernier salon où l'on cause ", où les " affaires " se faisaient et défaisaient.

Cette ruée vers l'Auberge des Pyramides s'accentua encore davantage lorsque, au cours d'une manifestation de bienfaisance, le roi Farouk fit son apparition, entouré de sa cour.

Jusque-là Farouk n'avait jamais été vu dans un lieu public tel ce restaurant-spectacle.

La présence de Farouk se renouvela à plusieurs occasions et les gens se précipitèrent à l'Auberge dans le dessein de le voir de près ou de rencontrer tel personnage influent de son entourage susceptible de favoriser l'une de leurs démarches.

Connaissant les entrées de Soussa au Palais, - même si ce n'était que par la porte de service - le bruit courut que le roi était l'un des actionnaires de l'Auberge.

Il n'en était rien, mais Soussa aurait été le dernier à démentir un bruit qui ne pouvait que servir son établissement.
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Farouk, point-besoin de le présenter. Il s'en est dit bien des choses sur sa personnalité ou l'image que l'on s'est faite de lui à travers Les différents échos colportés.

Roi fainéant, roi aux mœurs dissolues, roi jouet de son entourage. Rien de cela ne correspond à la réalité telle qu'elle m'était apparue à cette époque, sauf peut-être la faiblesse de son caractère et la versatilité de ses humeurs.

Rappelons néanmoins le propos qu'on lui a prêté : "Bientôt, aurait-il dit, il ne subsistera au monde que cinq rois, le roi d'Angleterre et les quatre rois du jeu de carte." Ce qui dénotait chez lui une certaine lucidité et expliquait une partie de son comportement.

De multiples souvenirs se bousculent dans mon esprit, mais il serait abusif d'utiliser l'espace du site Ajoe. Peut-être à une autre occasion.

Je voudrais terminer par un souvenir de la fin de la guerre 39/45.

Quelle explosion de joie, cette fin de la guerre. Renée Davelly, (une chanteuse coincée en Egypte à cause de la guerre) était au mieux avec les responsables de la France Libre. Elle s'était arrangée pour trouver une place dans l'un des premiers avions en partance pour la France. À son retour, elle nous ramena... un camembert. Un camembert ! nous n'en avions pas goûté depuis des années. Et puis un camembert, c'était la France.

Et puis les années se succédèrent jusqu'à mon expulsion en 1956.

Roland Bertin


(c) Misha